J’ai encore les tongs aux pieds et du sorbet vanille-fraise plein les doigts, mais certaines de mes lectures de cet été m’ont inspiré. Notamment La Guerre des intelligences, le dernier essai du Dr Laurent Alexandre, à lire absolument. En l’occurrence, l’ouvrage(1) traite de l’IA sous toutes ses formes, et surtout du fait qu’elle va tous – nous les humains – nous renvoyer aux oubliettes de l’évolution (les dinosaures ont bien fini par disparaître et même l’empire romain s’est écroulé, alors…). On est tous fichu, la seule question est de savoir si ce sera avant la prochaine Coupe du monde de foot ou après.
Je me suis donc livré à un petit test, à la portée de tous : la traduction. N’oublions pas en effet que la traduction linguistique était l’une des motivations des pionniers de l’IA dans les années 1960, financée en partie par des Men in Blackqui auraient bien aimé des gadgets de traduction automatique russe/anglais, si vous voyez ce que je veux dire. Bref, le test est très bête : il s’agit de demander à Google Traduction de traduire la fable Le Corbeau et le Renard, mais avec une légère difficulté supplémentaire : on va lui faire traduire du français vers l’anglais, puis de l’anglais vers une troisième langue, puis de cette troisième langue vers une quatrième, etc. pour enfin revenir au français. J’ai choisi de ne retenir que certaines des dix langues les plus parlées dans le monde(2), à savoir : le mandarin, l’anglais, l’espagnol, le français, l’arabe, l’hindi, le russe, le portugais, le bengali et le japonais. Compte tenu des difficultés des alphabets non latins, je me suis restreint à l’anglais, l’espagnol, le français et le portugais, et j’ai ajouté l’allemand, l’italien, le suédois, le polonais, l’islandais et le norvégien pour obtenir dix langues et faire un tour complet.
Pour ceux qui passaient les cours à jouer en cachette au Tamagotchi ou à baratiner la jolie voisine avec ses taches de rousseur, je rappelle que le texte d’origine est le suivant :
Maître Corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître Renard, par l’odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
« Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau,
Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois. »
À ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie,
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le Renard s’en saisit, et dit : « Mon bon Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l’écoute.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute. »
Le Corbeau honteux et confus
Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.
Après l’avoir passé aux moulinettes successives de l’anglais, l’espagnol, le portugais, l’allemand, l’italien, le suédois, le polonais, l’islandais et le norvégien pour enfin revenir au français, on obtient ça :